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Lucie B., Genève
Le transfert du bail est un contrat tripartite, par lequel un nouveau locataire (le bénéficiaire du transfert) acquiert les droits et obligations d’un locataire sortant (le transférant), moyennant l’accord du bailleur.
L’obligation pour le bailleur de transférer le contrat au bénéficiaire du transfert n’est effective que si les conditions légales sont réunies, et uniquement dans le cadre de baux de locaux commerciaux (à l’exclusion des baux d’habitation).
Conditions préalables
Le consentement du bailleur, exigé par la loi, est une condition suspensive du transfert. Il suppose qu’une demande de transfert lui ait été présentée par le locataire.
C’est le locataire transférant (et non le bénéficiaire du transfert qui, à ce stade, n’a aucun lien de droit avec lui) qui doit solliciter l’accord du bailleur. La requête devra être formulée suffisamment à l’avance.
En l’occurrence, il appartient à votre locataire de vous soumettre le dossier complet au sujet de la personne intéressée à la reprise du bail.
En outre, sachez que vous êtes en droit d’exiger du transférant qu’il vous fournisse tous les renseignements vous permettant de vous prononcer en toute connaissance de cause sur la requête de transfert, soit en particulier: les données relatives à la solvabilité du bénéficiaire (extrait de l’Office des poursuites et des faillites, bilans et comptes de pertes et profits etc.), les informations concernant ses capacités professionnelles (par exemple l’autorisation d’exploiter l’activité commerciale exercée dans les locaux) et le montant de la remise de commerce.
De plus, lorsque vous aurez été invitée à consentir au transfert du bail, vous devez disposer du temps nécessaire à recueillir les renseignements utiles sur le bénéficiaire du transfert, en sus de ceux qui vous ont déjà été communiqués avec la demande. Ce délai de réponse est fonction de la complexité de l’affaire, soit de 30 à 60 jours.
Conformément aux exigences légales, votre consentement devra intervenir par écrit.
Consentement
Dans l’hypothèse où la requête de transfert a été formulée correctement, vous êtes tenue d’y donner votre consentement, à défaut de l’existence d’un juste motif.
Toutes les circonstances objectives et subjectives qui, selon les règles de la bonne foi, ne permettent pas d’imposer au bailleur une relation contractuelle avec le bénéficiaire du transfert doivent être considérées comme de justes motifs. Il en va ainsi dès que le transfert est propre à engendrer un risque de détérioration de la situation du bailleur. Soit par exemple si le potentiel bénéficiaire n’a pas une aussi bonne assise financière que le locataire, s’il est, de façon générale, un mauvais payeur, ou s’il travaille dans une branche en crise dont l’avenir est incertain. Dans le cas où l’activité envisagée par le repreneur était sensiblement différente du locataire transférant, il se pourrait aussi que ce changement soit considéré comme un juste motif de refus.
Dans votre situation, la question se pose de savoir si vous pouvez refuser au motif du changement d’activité. Si le nouvel exploitant souhaitait ouvrir un café ou un restaurant, vous pourriez plus facilement opposer un refus, au vu des désagréments que cette exploitation pourrait causer aux habitants de l’immeuble. En revanche, la question n’est pas aussi claire pour un magasin de tabac. Il conviendrait en premier lieu de voir ce que votre bail stipule sous la rubrique «affectation des locaux». En effet, si l’affectation prévue est mentionnée comme «commerce de détail ou vente de vêtements», cette affectation doit demeurer. Si elle est plus floue, comme par exemple «magasin», ou même si rien n’est indiqué, tant que l’affectation est commerciale, vous pourriez être amenée à accepter presque n’importe quelle affectation, tant qu’elle est commerciale. D’où l’importance d’être très précis dans la définition d’une affectation au moment de la rédaction du contrat de bail, voire dans l’indication des horaires d’ouverture!
Conséquences
Si le bailleur donne son consentement, le bénéficiaire du transfert prend la place du transférant dans le contrat, au jour où le bailleur a donné son consentement.
Toutefois, le transférant reste solidairement responsable des obligations découlant du bail, soit jusqu’à l’échéance contractuelle ou légale pour laquelle le bail est ou pourrait être résilié (bail de durée indéterminée), ou jusqu’au terme fixe du contrat (bail de durée déterminée), soit si cette échéance est plus lointaine, jusqu’à l’expiration d’une période de deux ans, à dater du jour où le transfert est effectif (le transfert n’intervient pas nécessairement le jour où le consentement est donné).
Par conséquent, si vous ne pouvez pas opposer un refus au transfert, votre locataire actuel assumera, à côté du repreneur, pendant une durée de deux ans, les obligations découlant du contrat de bail.
Il s’agit essentiellement des obligations afférant au paiement du loyer. Cependant, le texte légal ne fixe aucune limite. Le transférant assume donc la remise en état de la chose louée, suite aux éventuels dégâts commis par le bénéficiaire du transfert. De même, le transférant est responsable, pendant les deux ans précités, des indemnités dues pour occupation illicite des locaux par le bénéficiaire du transfert dont le bail aurait été résilié pour retard dans le paiement du loyer.
Défaut de consentement
Lorsque le transfert de bail est exécuté malgré son refus justifié, le bailleur peut résilier le bail de manière anticipée, après avoir vainement mis en demeure le locataire transférant de récupérer les locaux. Le locataire s’expose également à payer des dommages-intérêts.
Article paru dans l'hebdomadaire Tout l'immobilier
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